Les muscles sous-occipitaux, souvent sous-estimés!
- Michèle

- 16 juil.
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 sept.

Lorsque le néocortex est arrivé dans la boîte crânienne, au cours de l’évolution, ça a posé un grand problème, un problème de grosse tête, un problème d’enfantement surtout... en effet, cette boîte crânienne ne passait plus au travers du bassin de celle qui la portait en son ventre. La Nature a dû résoudre ce problème et, plutôt que de choisir offrir un bassin plus large à la femme, elle a fait naître les bébés prématurément, au seuil du niveau viable. L’un des prix à payer est la disproportion entre le poids de la tête et la capacité des muscles cervicaux de la soutenir.
Ces muscles cervicaux, même en vieillissant, ont toujours une fonction très importante et sont très souvent les premiers à payer pour une multitude de causes. Avec les douleurs lombaires, les problèmes de cou et les maux de tête sont l’une des raisons de consultation numéro 1, dans mon cabinet.
Déjà, dans ma pratique en massothérapie, je m’intéressais particulièrement au lien entre les muscles de la base du crâne et les maux de tête, constatant que j’avais un grand impact sur cette problématique. C’est sans doute pour cette raison que j’ai consacré mon travail de fasciae, lors de ma quatrième année d’étude en ostéopathie, sur les fameux muscles sous-occipitaux. Au cours de cette recherche, j’ai lu plusieurs études, plus intéressantes les unes que les autres, les concernant. Je partage donc ici avec vous les découvertes que je crois les plus dignes d’être connues.
Description sommaire des sous-occipitaux
Tout d’abord, laissez-moi vous les situer dans le corps. Il s’agit, comme vous l’avez sûrement compris, d’un groupe de plusieurs muscles (4) liant l’occiput aux 2 premières vertèbres cervicales. L’occiput est l’os à la base de votre crâne. Trois de ces muscles forment un triangle, le triangle de Tillaux, (grand droit postérieur, oblique supérieur, oblique inférieur) et le quatrième (petit droit postérieur) est tout petit et se trouve entre les 2 triangles, comme vous pouvez voir sur l’image ci-dessous.

Dans les prochaines lignes, vous découvrirez comment la posture et les accidents peuvent avoir des conséquences importantes sur ces muscles et vous amenez des symptômes comme des vertiges, étourdissements, maux de tête et même avoir un impact sur votre système nerveux central!
Posture
Le cas classique de densification des muscles sous-occipitaux est le travail prolongé à l’ordinateur. Il est important de ne pas avoir envie de manger l’écran, lorsque vous êtes installé au bureau. Ce que je veux dire par là, c’est de vous assurer que votre tête reste bien alignée avec le reste de votre colonne et qu’elle ne s’avance pas vers l’écran (ce que nous appelons de la protrusion). Ce mouvement de protrusion, lorsque répété très souvent et/ou de façon soutenue, va effectivement finir par densifier ce petit groupe musculaire, réponse normale à un recrutement musculaire.

De la même façon, l’écran devrait toujours être à la hauteur des yeux, de manière à ne pas amener la tête en flexion, même légère!
Une équipe de chercheurs s’est intéressé au rôle des grand et petit droits postérieurs dans la protrusion cervicale volontaire. Ils ont utilisé un électromyogramme pour mesurer leur activité nerveuse en position neutre et en protrusion. Leur conclusion: la position neutre utilise entre 10% et 18% d’activation alors que la protrusion fait monter cette activation jusqu’à 42%.
Des recherches scientifiques ont de plus démontré que les muscles du cou participent au sens de l’équilibre et à la posture générale. En effet, plusieurs d’entre eux ont performé des expériences en sectionnant les muscles du cou de chats, lapins et autres animaux (!) en ayant, pour résultat, toujours la même démarche chambranlante, de la part de ces animaux, comme intoxiqués à l’alcool. Ce type d’expérience a aussi été mené sur des singes qui ont été injectés avec un anesthésiant local aux trois premières racines nerveuses cervicales, ayant pour même conséquence des troubles de l’équilibre et de la posture.
Ces recherches ont été recoupées avec d’autres effectuées sur le nombre de fuseaux neuro-musculaires (FNM) présents dans chaque muscle cervical. Les FNM sont des capteurs nerveux liés à la proprioception, c’est-à-dire à la perception du corps dans l’espace. La théorie des chercheurs fait le lien entre les deux: les muscles cervicaux étant très riches en FNM, ils ont donc une fonction importante de proprioception, allant jusqu’à causer des étourdissements et déséquilibres lorsqu’ils ne sont plus en état de transmettre leurs informations.
Le muscle oblique supérieur a une densité de FNM à 190 et l’oblique inférieur a une densité de 242. Pour fins de comparaison, les densités du trapèze et du grand dorsal sont de 2.2 et 1.4!
Certains auteurs vont même jusqu’à proposer que les muscles sous-occipitaux, du fait de leur courte longueur, n’auraient pas tant un impact au niveau des mouvements de la tête, mais serviraient plutôt en tant que détecteur de mouvement de l’articulation craniovertébrale.
Considérant que deux des quatre muscles sous-occipitaux participent activement à la posture cervicale et considérant la haute densité en FNM des deux autres, nous pouvons avancer l’hypothèse selon laquelle ils ont finalement, en tant qu’unité fonctionnelle, un impact sur tout le corps. Un étudiant en ostéopathie de l’Institut Dauphine d’Ostéopathie (France) a d’ailleurs choisi ce sujet pour son mémoire final en utilisant l’empreinte de la sole plantaire, à la suite de traitements des sous-occipitaux, pour voir leur impact sur la posture jusqu’aux pieds.
Son étude a porté sur l’empreinte plantaire de 25 sujets (dont aucun n’a les pieds plats) et, pour tous, l’inhibition des sous-occipitaux a complètement changé le point d’appui principal sur la sole plantaire.

Faites donc attention à votre posture cervicale, question d’optimiser les fonctions de votre corps au complet !
Accident
Qui dit accident de voiture ou accident sportif dit très souvent coup du lapin (en anglais : whiplash), qui se compose d’un mouvement très rapide de flexion-extension de la tête. Les symptômes suivant un coup du lapin sont évidemment les douleurs cervicales, mais aussi des vertiges, étourdissements, acouphènes et maux de tête. Ils surviennent généralement rapidement après l’accident et prévalent pendant trois à quatre semaines (50% des cas), mais peuvent continuer pendant un an (40%).
Une étude de 2006 utilisant comme outil l’IRM a analysé la teneur en gras des muscles extenseurs de la tête, dont font partie les sous-occipitaux, chez 113 femmes souffrant de symptômes de coup du lapin à long terme (entre 3 mois et 3 ans suivant l’incident). Ils ont découvert que les muscles petit et grand droit postérieurs ont une teneur en gras anormalement élevé, plus élevé que les autres muscles extenseurs de la tête et plus élevé que chez le groupe contrôle. C’est dire que ces petits muscles ont un impact considérable sur les symptômes du coup du lapin au long court, étant donné leur changement de forme.
Un peu plus d’anatomie et de liens
Lorsque j’ai effectué ma recherche sur les sous-occipitaux, j’ai été jeté par terre par ce que vous lirez dans les prochaines lignes. Plusieurs recherches par dissection et par imagerie le confirment maintenant, des ponts myoduremériens existent entre les muscles petit droit postérieur et grand droit postérieur de la tête, avec la dure-mère. Plus récemment, des chercheurs en ont aussi trouvé en lien avec l’oblique inférieur de la tête. Ils auraient tous comme fonction de prévenir le plissement de la dure-mère lors des mouvements d’extension de la tête.

Dans un prochain article, je vous parlerai plus à fond de la dure-mère, mais sachez qu’il s’agit de la couche de protection la plus solide de tout votre système nerveux central, donc de votre cerveau et votre moelle épinière. La dure-mère se divise en plusieurs feuillet, dans la boîte crânienne, dont les plus connus sont la faux du cerveau et la tente du cervelet. La dure-mère est l’une des structures centrales de première importance dans le corps humain et très souvent considérée dans un soin ostéopathique. Elle va, entre autres, participer à l’équilibre et le bon fonctionnement de votre système nerveux central, ce qui n’est pas peu dire.
Maux de tête
Les céphalées de tension font partie prenante de la vie de la presque entièreté de la population. En effet, certaines études ont démontré que 78% des gens en souffrent. Leurs critères de diagnostic, selon la International Headache Society, sont les suivants : aucune nausée, présence de photophobie ou phonophobie (ou aucun des deux) et au moins deux de ces quatre critères: localisation bilatérale, sensation de serrement ou de pression (pas de pulsation), intensité faible ou modérée et aucun impact de l’activité physique comme la marche ou monter des escaliers.

Il a été démontré que les céphalées de tension chroniques sont influencées par la raideur des muscles de la tête et du cou. Une étude portant sur 386 sujets a effectivement mis à jour le lien entre les tensions musculaires et la prévalence de céphalées. Leur recherche portait principalement sur les maux de tête bilatéraux, mais ils ont par ailleurs constaté que les gens ayant des douleurs unilatérales avaient aussi un niveau de tensions musculaire élevé du même côté que leur mal de tête. C’est ce que nous constatons en clinique alors que nous pouvons habituellement prédire de quel côté les clients ressentent leur mal de tête, dépendant quels sous-occipitaux manquent de souplesse. Cette unilatéralité serait probablement plus précurseur de céphalées cervicogéniques, que je décris un peu plus loin.
D’autre part, sachant que la dure-mère est amplement innervée, nous pouvons comprendre que l’atrophie du muscle petit droit postérieur de la tête peut être une cause de mal de tête. Ne remplissant pas son rôle d’empêcher la dure-mère de se replier sur elle-même, lors de l’extension de la tête, celle-ci envoie donc des signaux de douleurs référés. Ce repliement peut aussi rétrécir l’espace sous-arachnoïdien; autre cause de douleur. Le petit droit postérieur est le muscle le plus susceptible de s’atrophier étant donné qu’il résiste moins bien aux impacts en basse énergie. Constatez ici le lien entre les chocs en coup du lapin et les maux de tête.
Les céphalées cervicogéniques sont classées dans les céphalées de deuxième ordre, c’est-à-dire qu’elles font suite à une autre dysfonction connue comme causant des maux de tête. Les critères de diagnostique sont les suivants : deux de ces quatre critères doivent être remplis… des céphalées ont débuté suite à l’apparition d’un trouble cervical, la céphalée s’est résorbée suite à la disparition de la dysfonction cervicale, l’amplitude de mouvements cervicaux est diminuée avec une augmentation de la douleur lors de manœuvres provocatrices, la douleur est abolie lorsqu’une anesthésie locale est effectuée sur des structures cervicales (ou leur innervation) pouvant être en cause.
L’une des céphalées cervicogéniques la plus répandue est la névralgie d’Arnold. Il s’agit d’une neuropathie périphérique, c’est-à-dire l’atteinte d’un nerf périphérique, dans ce cas-ci le nerf grand occipital (ou nerf d’Arnold), évidemment. Ce nerf se fraie un passage en plein centre du triangle de Tillaux. Les symptômes peuvent être fulgurant et d’une longue durée (jusqu’à plusieurs semaines). La manifestation la plus courante est une douleur vive localisée ou irradiante, de type brûlure ou décharge électrique. Elle peut être déclenchée par un simple contact avec le nerf ou par un déplacement vertébral. Étant donné l’étroite relation avec les muscles sous-occipitaux, nous pouvons supposer qu’ils peuvent, ici aussi, être une cause d’irritation et de déclenchement de névralgie.
En conclusion
Pour prendre soin de la base de votre crâne et donc de tout votre corps, faites attention à votre posture, c’est l’aspect sur lequel vous avez le plus de contrôle. Pour de plus amples informations au sujet des différentes postures ayant un grand impact sur le confort physique, je vous invite chaudement à lire mon article sur le sujet!
Si vous présentez des symptômes énumérés ci-dessus, que vous avez déjà eu un coup du lapin ou un impact au niveau de la tête, je vous invite chaudement à consulter un thérapeute manuel ou votre médecin, qui pourra vous soutenir dans votre projet de mieux-être.
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Bien hâte de lire tes billets sur les postures !
Super intéressant merci
Vraiment intéressant ! Merci pour toutes ces infos Michèle !